La rotation des capitaux des grands fonds des États-Unis vers l’Europe est-elle toujours d’actualité ? Peut-être que cette tendance, particulièrement marquée après le Liberation Day du 2 avril (jour où Trump a annoncé pour la première fois les droits de douane) et l’effondrement consécutif des marchés boursiers américains, s’est atténuée au cours de l’été. En effet, grâce à une Fed plus accommodante sur les taux, Wall Street évolue actuellement autour de ses plus hauts historiques.

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La découverte de la périphérie

Il n’en reste pas moins que l’Europe, longtemps marginale dans les grands mouvements des marchés mondiaux, est aujourd’hui revenue au centre de l’attention. Les performances en témoignent : si l’on considère uniquement les principaux indices du continent, depuis le début de l’année, l’Ibex de Madrid a gagné 30 %, suivi du Ftse Mib de Milan (+23,5 %) et du Dax de Francfort (+18,3 %). La véritable nouveauté réside toutefois dans la surperformance de ce qui était autrefois la périphérie du continent : l’Italie et l’Espagne, mais aussi la Grèce (+39 %) et la Pologne (+29 %). Cela reflète également l’état de santé économique des pays : l’Allemagne et la France, autrefois locomotives incontestées, freinent aujourd’hui, tandis que la périphérie est en pleine lune de miel avec le marché et les agences de notation.

Et même en termes d’évaluations, les marchés du Vieux Continent continuent de bénéficier d’une décote : l’indice MSCI Europe en euros se négocie à 14,5 fois les bénéfices attendus, contre un ratio cours/bénéfice de 20 pour l’indice mondial MSCI World et de 22,8 pour le MSCI USA.

Europe ou États-Unis ? Les secteurs où l’UE est favorisée

La véritable question que se posent aujourd’hui les gestionnaires et les experts du marché est de savoir si l’Europe peut être une véritable alternative aux États-Unis.

« Les solides performances des actions américaines au deuxième trimestre ont réduit l’écart de performance depuis le début de l’année », analyse Rebecca Chesworth, stratégiste senior chez State Street Investment Management.

Elle souligne toutefois un aspect important : « Nous continuons de penser que certains secteurs européens offrent de meilleures opportunités ou des perspectives plus sûres que leurs équivalents américains. C’est le cas du secteur de la santé : près de 80 % de ce secteur est constitué de grandes entreprises pharmaceutiques de qualité, qui font rapidement preuve d’une plus grande innovation ».

Les fonds les plus performants

On constate que les 10 fonds d’actions actifs sur les actions européennes classés par rendement depuis le début de l’année 2025 ont eu une performance moyenne de 24,5 %, et passer à plus de 26,5 % sur un horizon annuel et même à plus de 72 % (avec des pics à 131 %) sur une perspective triennale. Le tout avec des coûts moyens assez élevés, égaux à 1,5 %, mais variables : ils vont en effet d’un minimum de 0,7 % à un maximum de 3,65 % par an.

Comme on peut le constater, il existe en Europe une distinction nette entre deux catégories de fonds : ceux sur les pays développés et ceux sur les pays émergents, comme par exemple les États d’Europe centrale et orientale. « Il ne suffit pas de qualifier de manière générique les actions européennes comme un bloc homogène ». En termes de volatilité, par exemple, « sur dix ans, les indices annualisés oscillent entre des valeurs proches de 12-13 %, typiques des marchés développés les plus liquides, et des niveaux proches de 18-19 % pour les marchés émergents et les petites capitalisations ». Cette différence, poursuit l’experte, « est importante car elle implique un risque prospectif presque double ».

Les points forts des bourses européennes

Generali Asset Management aborde cette classe d’actifs avec le compartiment Gis Central & Eastern European Equity, deuxième au classement Fida avec un rendement depuis le début de l’année de 27,3 % et des coûts de 1,8 %. Comme son nom l’indique, le fonds se concentre sur les titres des pays émergents d’Europe, mais Luca Colussa, responsable des actions factor & quant, voit divers éléments d’optimisme pour l’ensemble du continent.

Outre les valorisations, le gestionnaire de fonds cite « la rémunération élevée des actionnaires grâce aux dividendes et aux rachats importants, les perspectives de reprise de la croissance et la relance budgétaire allemande, avec ses effets positifs sur l’ensemble de la zone ». Au niveau sectoriel, M. Colussa privilégie à moyen terme « le secteur bancaire pour sa forte génération de trésorerie, les titres de la défense pour les plans pluriannuels de dépenses publiques et ceux exposés aux métaux précieux ».

Un continent à découvrir

Mirabaud Am part à la découverte des titres européens (hors Royaume-Uni) avec un fonds au nom évocateur : Discovery Europe Ex-Uk, qui a gagné 23,95 % depuis le début de l’année avec des coûts assez modérés, à 0,75 %. Hywel Franklin, responsable des actions européennes, ajoute à ces éléments d’optimisme « les fusions et acquisitions : nous voyons le potentiel d’une reprise de l’activité à partir de maintenant, compte tenu de la baisse des coûts de financement et d’une plus grande stabilité économique ».

En ce qui concerne la sélection des titres, le gestionnaire financier se base principalement sur les évaluations. « Le moment est idéal pour investir dans ce segment, plusieurs sociétés se négociant à des niveaux intéressants ».

Grèce, Hongrie, marchés frontières

L’Europe émergente est également à l’honneur chez Schroders, qui, avec le fonds Sisf Emerging Europe, affiche depuis janvier une performance de 22,2 %, avec des coûts annuels de 1,5 %. Rollo Roscow, gestionnaire de fonds actions marchés émergents de la société de gestion, estime que « les rendements sur fonds propres de l’indice émergent sont aujourd’hui supérieurs à ceux de l’Europe développée ». Mais quels sont les pays préférés ?

« Nous continuons à voir de bonnes opportunités en Grèce, compte tenu des évaluations avantageuses ». En Hongrie, poursuit le gestionnaire, « étant donné qu’il s’agit d’un marché concentré, nous constatons des fondamentaux solides dans les secteurs de la santé et de la banque ». D’autres pays surpondérés sont « ceux des marchés frontières comme le Kazakhstan, la Géorgie et la Slovénie, grâce à des rendements composés solides et des dividendes élevés ».