
79 % des Suisses ont voté contre l’initiative, avec un taux de participation d’environ 43 %. Les opposants craignaient qu’une défaite serrée n’encourage à l’avenir de nouvelles propositions similaires. Ce référendum, considéré comme l’un des projets les plus controversés de ces dernières années, s’inscrit dans un contexte mondial caractérisé par l’opposition entre les pays qui cherchent à attirer les personnes fortunées par des incitations fiscales, comme l’a fait l’Italie, et ceux qui, au contraire, entendent taxer les richesses qu’ils jugent excessives.
La proposition pour les capitaux supérieurs à 50 millions de francs suisses
La proposition, présentée par le parti de gauche Jeunes socialistes, aurait introduit un impôt fédéral sur les successions et les donations de 50 % sur les patrimoines et les transferts supérieurs à 50 millions de francs suisses, mettant ainsi fin à la tradition suisse d’un système fiscal décentralisé et très modéré. Les recettes auraient été affectées à des dépenses liées au climat.
Le gouvernement fédéral s’y était opposé, avertissant que cette mesure compromettrait l’image de la Suisse en tant que pays stable pour la richesse internationale. La proposition initiale prévoyait également la rétroactivité, une clause qui avait suscité de vives critiques de la part du monde des affaires et des fiscalistes. La version de la norme avait ensuite été atténuée.
La proposition avait semé le trouble parmi les family offices et les citoyens suisses disposant d’importants capitaux, dont certains envisageaient de s’expatrier en vue du vote. Des économistes et des avocats avaient averti que cette mesure pourrait compliquer les plans de succession des entreprises familiales disposant d’actifs peu liquides. Frédéric Rochat, associé gérant de la banque privée suisse Lombard Odier, a expliqué que le résultat du vote montre que :
« … le bon sens a prévalu. Les Suisses apprécient que les politiques de leur pays restent stables et prévisibles. Ils rejettent les populismes de base qui créent un bruit inutile ».
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La concurrence étrangère : Italie, Dubaï, Hong Kong, Abu Dhabi et Singapour
Ce vote intervient à un moment où certains centres financiers se disputent les familles fortunées. Parmi ces pays qui attirent le plus de millionnaires, Dubaï, Abu Dhabi, Hong Kong et Singapour offrent des avantages fiscaux pour encourager l’arrivée des véhicules d’investissement privés des plus grandes fortunes privées mondiales. Hong Kong comptait en 2023 2 700 family offices et vise désormais à en attirer 200 autres d’ici la fin 2025.
Dans d’autres pays, en revanche, les gouvernements durcissent les règles ou augmentent les impôts. L’Italie a connu un boom de nouvelles fortunes arrivées grâce au régime fiscal forfaitaire sur les revenus étrangers, en particulier à Milan, même si le gouvernement a annoncé en octobre que l’impôt augmenterait de 50 % à partir de l’année prochaine, pour atteindre 300 000 euros. La France devrait perdre environ 800 contribuables fortunés, soit un manque à gagner de 4,4 milliards de dollars (5,5 millions par personne).
Les avocats suisses ont déclaré que la proposition référendaire avait compromis la capacité de la Suisse à attirer les contribuables fuyant le Royaume-Uni après le changement des règles sur les non-dom, beaucoup d’entre eux ayant préféré s’installer en Italie plutôt que dans la Confédération helvétique. Entre-temps, fin octobre, le Parlement français a rejeté une proposition socialiste visant à instaurer un impôt de 2 % sur les fortunes supérieures à 100 millions d’euros. Une autre proposition visant à taxer de 3 % les patrimoines supérieurs à 10 millions a également été rejetée.



