C’est probablement la question la plus importante en économie à l’heure actuelle : la hausse des taux d’intérêt va-t-elle durer ? La réponse vaut pas moins de 300 000 milliards de dollars de dettes éparpillées parmi les citoyens du monde, qui luttent désormais pour rembourser des prêts auparavant beaucoup moins chers.

Il ne fait aucun doute que la politique monétaire agressive menée par les banques centrales les plus importantes au monde a modifié l’économie et la situation des ménages : les hypothèques sont plus coûteuses à rembourser, le remboursement des prêts est plus compliqué et la capacité de dépense est réduite. Ajouté à la montée en flèche de l’inflation après le Covid et la guerre en Ukraine, le resserrement de la Fed, de la BCE, de la BoE et d’autres banques centrales a des résultats moins visibles sur les prix, mais plus impactants sur les budgets des ménages, selon certains stratèges.

Et maintenant, une autre grande question se pose : si le pic du coût de l’argent a bien été atteint, combien de temps ce niveau élevé des taux va-t-il durer ? Quelques réflexions.

Qu’adviendra-t-il des 300 000 milliards de dettes avec des taux aussi élevés ?

L’attention des économistes se porte désormais sur le taux d’intérêt neutre à long terme, c’est-à-dire le niveau de taux qui permet de maintenir l’inflation au taux privilégié par la banque centrale, soit environ 2 %. Dans la zone euro, la BCE a porté ce taux à 4,50 % et aux États-Unis, il est désormais de 5,5 %. Des taux élevés, mais sont-ils destinés à s’arrêter là et pour combien de temps ? Les réponses ne sont pas anodines.

Au cours de la décennie qui a suivi la crise financière de 2008, le taux neutre a baissé dans toutes les économies développées, car l’inflation est généralement restée modérée, même si les banques centrales ont maintenu les taux d’intérêt à des niveaux historiquement bas. La flambée des prix qui a suivi la crise a toutefois ébranlé ce calme, suscitant un débat parmi les économistes, les banquiers centraux et les opérateurs obligataires sur l’avenir de l’inflation et des taux d’intérêt, avec des implications très concrètes pour un monde criblé de quelque 300 000 milliards de dollars de dettes.

Anna Wong, économiste en chef pour Bloomberg Economics aux États-Unis, a récemment analysé ce que différentes estimations du taux d’intérêt neutre signifieraient pour les paramètres de la politique de la Réserve fédérale. Elle a constaté qu’un taux neutre plus élevé entraînerait moins de réductions des taux d’intérêt au cours des deux prochaines années.

Echaudés par l’échec de l’analyse et de la communication qui a conduit à des prévisions erronées selon lesquelles l’inflation serait transitoire alors que les prix ont grimpé en 2021, les responsables de la Fed ne révèlent pas grand-chose ces jours-ci en ce qui concerne leur vision des taux à long terme. La prudence les incite plutôt à déclarer qu’il est trop tôt pour dire exactement où l’inflation et les taux se stabiliseront une fois que l’économie se sera normalisée.

Que va-t-il se passer avec des taux d’intérêt atteignent des sommets ?

Des millions d’emprunteurs dans le monde, se sont heurtées au resserrement monétaire le plus brutal depuis une génération. Ils ont fait ce qu’ils ont pu pour résister à la tempête, mais la durée de cette résistance dépendra de facteurs indépendants de leur volonté, tels que la démondialisation, le vieillissement et le coût de la transition énergétique.

Contrairement à l’Amérique, où la plupart des emprunteurs immobiliers bénéficient de taux fixes sur 30 ans, en Australie, plus de 70 % des prêts hypothécaires sont liés à des taux variables qui évoluent en grande partie en fonction des niveaux de la banque centrale. L’endettement des ménages représentant en moyenne 190 % du revenu disponible, chaque hausse des taux d’intérêt de la Banque de réserve d’Australie a aggravé les difficultés des emprunteurs.