
L’euro s’est renforcé de 9 % depuis le « Liberation Day » du 1er mai et de 14 % depuis le début de l’année par rapport au dollar, principalement en raison des craintes pour l’économie et le déficit des États-Unis (suite aux politiques de Donald Trump) et pour l’indépendance de la Fed (à plusieurs reprises attaquée par le président américain).
L’effet négatif de l’euro fort sur les exportations s’ajoute à celui des droits de douane américains qui devraient être fixés à 10 % pour les entreprises de l’UE. L’appréciation de l’euro pourrait devenir un frein important à la croissance et à l’inflation au-delà d’un certain seuil de taux de change.
Les craintes de M. De Guindos
« Un niveau de 1,17 dollar, voire 1,20 dollar, n’est pas un problème », a déclaré le vice-président de la BCE, Luis De Guindos, à Bloomberg en marge du forum de Sintra, au Portugal. « Quelque chose de plus au-delà de ce seuil serait beaucoup plus compliqué. Mais 1,20 dollar est tout à fait acceptable ».
La BCE n’a pas d’objectifs en matière de taux de change, mais elle doit tenir compte de son impact sur la croissance et le coût de la vie. M. De Guindos a fait remarquer que « l’économie ne va pas bien. Le taux de croissance de la zone euro sera inférieur à 1 % en 2025 et légèrement supérieur en 2026. Les risques sont clairement orientés à la baisse ».
Le dollar reste la devise de référence du système financier international, mais les investisseurs (et également les banques centrales mondiales) diversifient leurs expositions en misant sur l’or et d’autres devises.
En outre, les marchés prévoient trois baisses de la Fed cette année (plus deux autres l’année prochaine), et une seule au total pour la BCE (pas lors de la prochaine réunion du 24 juillet).
La ligne de Powell
Le président de la Fed, Jerome Powell, a rappelé qu’« une solide majorité des membres de la Fed prévoit qu’il sera opportun de recommencer à réduire les taux au cours de l’année » et n’a exclu aucune hypothèse pour la réunion de fin de mois. En outre, Powell a laissé entendre que la Fed avait suspendu les baisses de taux en raison de l’impact inflationniste des droits de douane pour les États-Unis.
La banque centrale américaine a préféré attendre pour mieux évaluer l’évolution de l’économie, compte tenu de la forte incertitude. Powell a souligné que «l’évolution de la dette américaine n’est pas viable», mais a répondu aux questions sur les attaques de Trump en précisant seulement qu’il était « concentré sur le travail à accomplir ».
Le scénario de la zone euro
Dans la zone euro, l’inflation est revenue à 2 % en juin, selon les données publiées par Eurostat, en légère hausse par rapport à 1,9 % en mai. La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a déclaré à Sintra que pour l’instant, on ne peut pas parler de mission accomplie en matière de hausse des prix, mais plutôt d’« objectif atteint ». L’inflation devrait passer sous la barre des 2 % en 2026, puis revenir à 2 % en 2027, selon les projections de la BCE. Certains analystes ont toutefois souligné le risque d’une inflation inférieure aux prévisions de Francfort en raison de la faiblesse de l’économie et de l’appréciation de l’euro.
Selon Mme Lagarde, 2025 restera dans les mémoires comme une année « charnière » car « les investisseurs recherchent des alternatives » au dollar. « Il est évident que quelque chose s’est brisé. La question est de savoir si cela peut être réparé », a-t-elle déclaré. Il faudra voir si le renforcement de la monnaie unique deviendra un problème pour la BCE et la zone euro. Pour Mme Lagarde, il s’agit jusqu’à présent « du reflet des conditions du marché et de la vigueur de l’économie européenne ».