
En Europe, la situation n’est pas des plus réjouissantes. La viabilité des finances publiques européennes est menacée par l’évasion et la fraude fiscales. Le manque à gagner pour les caisses publiques européennes est énorme et s’élève, selon des estimations récentes, à 480 milliards de dollars par an, dont les deux tiers proviennent de multinationales qui détournent leurs bénéfices vers des paradis fiscaux, à l’intérieur et à l’extérieur de l’Union européenne.
Toutes les fragilités du système fiscal européen
Selon des études internationales, au moins 40 % des bénéfices étrangers des multinationales sont comptabilisés dans des juridictions à faible ou sans imposition, avec des taux effectifs compris entre 5 % et 10 %, voire nuls. Et contrairement à l’idée reçue, les paradis fiscaux ne se trouvent pas uniquement dans des territoires exotiques ou extra-européens : l’Irlande, le Luxembourg ou les Pays-Bas offrent des régimes extrêmement avantageux qui attirent des bénéfices du monde entier.
Face à ces mécanismes, le système fiscal européen révèle toute sa fragilité. Les règles actuelles laissent place à de vastes zones grises et à des échappatoires juridiques, donnant souvent lieu à des phénomènes tels que la double non-imposition et la fuite massive des capitaux. Il ne s’agit pas d’évasion fiscale au sens strict du terme, mais d’impôts théoriquement dus et non payés dans les faits grâce à des stratégies d’optimisation fiscale agressives.
Le « problème » des tax rulings
Parmi les instruments les plus controversés figurent les Advance Tax Ruling : des accords préalables entre les entreprises et les administrations fiscales qui fixent à l’avance les critères, les formules et les modalités de calcul de la charge fiscale. Comme les définit le Parlement européen, il s’agit de « documents écrits qui précisent comment les bénéfices d’une multinationale seront imposés et quelles règles s’appliqueront ».
Ce mécanisme est au cœur du débat public. « Les tax rulings appliqués par l’Irlande à Apple », a rappelé Tridico, « ont été jugés illégaux par la Cour de justice européenne et la multinationale américaine a été condamnée à rembourser 13 milliards d’euros d’évasion fiscale. Il n’y a pas de retour en arrière possible : la coopération fiscale doit être le principe directeur de l’Union européenne ».
La lutte contre l’évasion fiscale
Pour lutter contre ce phénomène, l’Union européenne a adhéré en 2021 à l’accord-cadre sur la taxation des multinationales promu par l’OCDE et signé par plus de 140 pays. Le premier pilier du traité exige que les impôts soient payés là où les multinationales génèrent effectivement de la valeur, même en l’absence de présence physique.
Le deuxième pilier, connu sous le nom de « Global Minimum Tax », introduit un taux minimum de 15 % pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 750 millions d’euros. Ce système vise à lutter contre la course à la baisse des impôts et à générer plus de 150 milliards de dollars de recettes supplémentaires au niveau mondial.
Vers un accord de libre-échange avec les Émirats arabes unis
S’il est vrai que certains paradis fiscaux se trouvent au sein de l’Union, il est tout aussi vrai que de nombreuses zones grises se trouvent en dehors de ses frontières : Émirats arabes unis, Singapour, îles Vierges britanniques, Bermudes. Ces pays offrent des régimes fiscaux ultra-légers, souvent associés à un manque de transparence des entreprises et à un échange limité d’informations financières. C’est avec ces acteurs que l’Union européenne tente d’engager un dialogue visant à renforcer la coopération afin de faciliter l’échange d’informations financières.
L’Union européenne explore actuellement la possibilité d’un accord de libre-échange avec les Émirats. « Nous avons constaté des progrès et une volonté de dialogue, mais il existe encore, dans certaines régions de la fédération, des zones grises qui pourraient favoriser le blanchiment d’argent, l’évasion et la fraude fiscales », a expliqué l’ancien président de l’INPS.
« Il s’agit d’opérations de diversification commerciale avec les Brics+ très importantes, surtout à la lumière des politiques agressives de Trump en matière de droits de douane. Il reste toutefois nécessaire d’inclure le chapitre de la coopération fiscale dans les négociation.