Il ne reste que peu de temps avant le dernier verdict de la BCE sur les taux avant la pause estivale, qui verra la présidente Christine Lagarde et ses collègues partir en vacances et reporter toute décision à la réunion de septembre. Demain, jeudi prochain, le 24 juillet 2025, le Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne fera sa grande annonce sur les taux d’intérêt de la zone euro.

Logo Euro de la BCE à Bruxelles

Il semble que les dés soient déjà jetés : après avoir réduit les taux directeurs dans la zone euro pour la huitième fois depuis juin 2024, Christine Lagarde & Co. opteront très certainement pour une pause, ce qui signifie que les taux des dépôts de la zone euro, les taux des opérations principales de refinancement et les taux des opérations de refinancement marginal resteront respectivement inchangés à 2 %, 2,15 % et 2,40 %.

La BCE justifiera très probablement l’arrêt du cycle de baisse des taux par la nécessité de connaître, avant tout, l’ampleur réelle des droits de douane que l’administration américaine de Donald Trump décidera d’imposer aux exportations de la zone euro : à hauteur de 30 %, comme annoncé il y a environ une semaine, à compter du 1er août prochain, ou peut-être moins, compte tenu des négociations en cours entre Bruxelles et Washington ?

La BCE vers le statu quo des taux ?

Alors que les négociations s’intensifient, interrogé par l’agence Reuters, Salomon Fiedler, économiste chez Berenberg, a présenté la raison pour laquelle la BCE décidera de rester les bras croisés, sans bouger et sans apporter de changement aux taux d’intérêt de la zone euro : « La BCE préférera attendre et voir si quelque chose la poussera vraiment à sortir de la situation d’équilibre dans laquelle elle se trouve ».

Il fait référence à la position théoriquement « favorable » dans laquelle se trouverait Francfort après avoir réduit ses taux d’intérêt à huit reprises : une affirmation qui a été faite par Mme Lagarde elle-même lors de sa dernière annonce le 5 juin dernier, lorsque la baisse a été de 25 points de base, comme précédemment.

C’est ce jour-là que Mme Lagarde a déclaré qu’« avec la baisse d’aujourd’hui, nous pensons être en bonne position pour naviguer dans les conditions d’incertitude qui se présenteront » dans les mois à venir, ajoutant que « nous approchons de la fin du cycle d’assouplissement » de la restriction monétaire. Cela dit, Mme Lagarde a ajouté, dans un effort évident pour ne pas trop s’avancer, confirmant ainsi que la BCE est très attentive aux données macroéconomiques, « je ne confirme pas de pause ».

Rien de nouveau, puisque cela fait des années que la présidente de l’Eurotower a l’habitude de tenir les marchés en haleine. Le cheval de bataille de Mme Lagarde est toujours le même et porte le nom d’inflation.

Les dernières « données issues des enquêtes indiquent des perspectives plus faibles (pour l’économie) à court terme », a expliqué la présidente de l’Eurotower lors de la conférence de presse qui a suivi l’annonce des taux, soulignant que « les droits de douane (de Trump) plus élevés et l’euro plus fort pourraient entraver les exportations ». Les tarifs de Trump pourraient donc exercer une pression à la baisse sur l’économie et l’inflation.

Des forces donc très intenses mais également contraires rendent objectivement difficile pour Lagarde de comprendre la marche à suivre. Peut-être, comme tout le monde l’espère, la situation sera-t-elle plus claire en septembre.

L’avis de l’expert : nouvelle baisse des taux, oui ou non ?

Ainsi, cette fois-ci, le choix devrait être de reporter une éventuelle baisse à septembre et de maintenir le statu quo pour cette réunion de juillet.

C’est ce qu’a également souligné l’expert George Curtis, gestionnaire de portefeuille chez TwentyFour, rappelant que « le Conseil des gouverneurs de la BCE a clairement indiqué en juin qu’il était bien placé pour faire face aux conditions d’incertitude qui se présenteront».

À cela s’ajoutent les nouvelles prévisions actualisées qui indiquent « une croissance saine du PIB pour cette année, mais une inflation inférieure à l’objectif à moyen terme ». Alors ? Selon Curtis :

« Nous ne pensons pas que la réunion de juillet apportera de grands changements. Au sein du Conseil des gouverneurs, il existe clairement des divergences d’opinion sur les effets inflationnistes potentiels des droits de douane, certains (Schnabel) soulignant les risques à la hausse liés à la fragmentation du commerce et au paquet fiscal allemand, tandis que d’autres estiment que les droits de douane pourraient avoir un effet déflationniste pour l’Europe, étant donné que l’excédent de l’offre asiatique est vendu dans la zone euro ».

En conséquence, la trajectoire vise un « assouplissement monétaire » considéré comme « plus facile en Europe, avec une inflation actuellement conforme à l’objectif et la possibilité réelle d’une période prolongée d’inflation inférieure à l’objectif au cours de l’année prochaine ». L’inflation devrait donc rester inférieure à l’objectif de 2 % fixé par la BCE non seulement en 2025, mais aussi en 2026, selon les estimations du gestionnaire.

On ne peut d’ailleurs exclure la possibilité que les droits de douane, malgré les négociations en cours entre l’Union européenne et l’administration Trump, « se maintiennent à un niveau plus élevé que prévu ». L’expert conclut ainsi son commentaire en affirmant que « la menace actuelle de droits de douane de 30 % à partir du 1er août, outre d’éventuelles représailles de la part de l’Europe, pourrait, à notre avis, entraîner un ralentissement de la croissance du PIB ».

M. Curtis a également déclaré que si cette situation devait perdurer, la BCE procéderait probablement à des baisses plus importantes que celles anticipées par le marché, même si nous continuons à penser que la stratégie du président Trump est celle de l’escalade pour désescalader ». Tout est reporté à septembre, selon l’économiste senior de la division européenne de la Société Générale, Anatoli Annenkov, qui a souligné à l’agence de presse Reuters que « toute l’attention se porte sur septembre », tandis que se poursuit la lutte habituelle et interminable entre faucons et colombes, qui a récemment vu s’afficher des visions diamétralement opposées de la part de l’Allemagne et de l’Italie.