On dit que l’herbe est toujours plus verte ailleurs…C’est probablement le sentiment de la plupart des français lorsqu’ils vont apprendre qu’un grand pays étranger a annulé la quasi-totalité de ses impôts ! Il s’agit plus précisément de l’Argentine, qui a supprimé l’impôt sur le revenu pour la plupart des travailleurs sur décision du ministre de l’économie, Sergio Massa, qui est candidat à la présidence. Une initiative séduisante et certainement plus qu’intéressante pour les citoyens argentins, ainsi que pour les Italiens qui apprennent la nouvelle. En réalité, cette stratégie est très insidieuse et a suscité l’inquiétude du Fonds monétaire.

L’Argentine a annulé presque tous les impôts

Le Parlement de Buenos Aires a approuvé le projet de loi proposé par le ministre Massa sur l’annulation des impôts sur le revenu pour 99 % des travailleurs argentins. La mesure concerne en fait tous les travailleurs qui gagnent moins de 1,77 million de pesos par mois, soit un peu plus de 5 000 dollars (5 066 pour être précis, près de 4 800 euros), ce qui correspond à 15 fois l’allocation minimale fédérale.

Environ 800 000 citoyens argentins, travailleurs et retraités confondus, seront donc exonérés de l’impôt sur le revenu. Par conséquent, les impôts sont limités à un éventail très étroit de citoyens, à savoir ceux qui produisent des revenus supérieurs à 5 000 dollars. Il suffit de dire que seulement 1 % des salariés entrent dans cette catégorie.

Le feu vert du Sénat est intervenu il y a quelques jours, le jeudi 28 septembre précisément, par 38 voix pour et 27 contre, et ce n’est qu’après de longs débats que ce grand pays a annulé l’impôt sur le revenu. Une mesure anticipée par le ministre Massa le 11 septembre, qui déclarait : “Pour moi, le salaire n’est pas un profit mais une rémunération”.

Une déclaration très noble – et qui suscite une approbation facile – mais qui coûtera au pays jusqu’à 0,83 % du PIB en 2024 (selon les estimations du Congrès de Buenos Aires).

Pas d’impôts pour 99 % des travailleurs, où est le problème ?

Dans la grave crise économique qui frappe le pays, l’annulation des impôts pourrait faire soupirer de soulagement les citoyens, mais seulement jusqu’à ce qu’ils commencent à réfléchir aux conséquences et surtout au prix à payer. Une contradiction ? Absolument pas. L’abolition de l’impôt sur le revenu, contre un gain net plus élevé pour les travailleurs (et les retraités), va en fait alourdir la dette publique, avec les conséquences naturelles que cela implique pour les citoyens ordinaires. Selon les économistes, quelque 5,7 milliards de dollars seront nécessaires pour soutenir la mesure, dont une partie sera obtenue en imprimant de la monnaie.

Mais rien n’est gratuit, et cette stratégie ne fera qu’augmenter l’inflation déjà très élevée, diminuant encore le pouvoir d’achat des citoyens. En effet, l’indice des prix à la consommation en Argentine est actuellement l’un des plus élevés au monde. En août, l’inflation annuelle a dépassé 124 %, soit le taux le plus élevé enregistré par le pays depuis la fin de la crise en 1991. En fait, sur une base mensuelle, le coût de la vie a augmenté de 12,4 %.

Ces chiffres sont appelés à s’aggraver avec les nouvelles mesures, entre l’abolition des impôts et l’augmentation des pensions et des salaires du secteur public. Tout cela fait partie de la manœuvre fiscale du ministre Massa, candidat aux élections présidentielles du 22 octobre, accusé par son adversaire Javier Milei (en tête des primaires d’août et des sondages) de vouloir “déclencher l’hyperinflation“.

En effet, les conséquences de cette manœuvre pourraient compromettre l’aide du Fonds monétaire international, en empêchant le pays de respecter la limite convenue pour le déficit de la dette publique. D’éventuelles mesures compensatoires sont donc à l’étude, afin de promouvoir les objectifs du ministre Massa (et ceux souhaités par la population) sans trop affecter la reprise.