
Le secteur bancaire américain est en effet plus concentré, plus efficace et domine de nombreux segments du marché, en particulier la banque d’investissement. Cependant, l’Europe semble prête à revenir dans la course : les taux d’intérêt sont en territoire positif, les excédents de capital accumulés au cours des dix dernières années sont redistribués aux actionnaires ou mis de côté pour de futures opérations de consolidation, le rendement des capitaux propres a été en moyenne supérieur à celui des banques américaines pendant plusieurs trimestres et nos responsables politiques ont recommencé à tenir compte de la compétitivité lorsqu’il s’agit de réformes réglementaires.
Comment l’Europe peut-elle rattraper son retard ?
Attention toutefois, les problèmes critiques demeurent. En 2025, l’écart macroéconomique continue de se creuser, même si l’Europe montre des signes de reprise potentielle avec les mesures de relance promises par l’Allemagne et l’UE, cette dernière pour la transition écologique.
En outre, la hausse du rendement des capitaux propres (ROE) des banques européennes à 12,3 % au deuxième trimestre 2025 (ABE), contre une moyenne de 11 % pour les 13 banques de l’indice Bankx aux États-Unis, est une performance de nature cyclique : sans réformes, un retour à des taux d’intérêt bas éroderait ces rendements, comme cela a été le cas entre 2010 et 2020, lorsque l’UE a enregistré une stagnation du ROE à 5 %.
Sur le plan réglementaire, le pragmatisme émerge enfin en Europe, mais avec un certain retard. La suspension de la FRTB jusqu’en 2027, annoncée par la Commission Européenne en juin 2025, évite de nouveaux chocs concurrentiels avec les États-Unis. La réforme de la titrisation pourrait également fournir aux banques européennes un outil de gestion budgétaire plus efficace que celui actuellement utilisé.
Cependant, les progrès réalisés dans le cadre de ces initiatives sont lents et l’Europe risque de perdre son récent avantage en termes de rentabilité.
Quelles différences avec les banques américaines ?
En ce qui concerne les risques, les banques européennes sont moins risquées et potentiellement plus résistantes aux chocs potentiels sur le crédit : c’est la contrepartie d’une réglementation plus stricte. Aux États-Unis, l’exposition au secteur immobilier commercial est élevée et celle aux institutions financières non bancaires, estimée à environ 300 milliards de dollars, est source de préoccupation depuis plusieurs trimestres en raison d’une série de faillites et de cas de fraude.
En Europe, cette exposition s’est avérée plus limitée, celle au secteur immobilier commercial représentant environ 10 % des prêts (contre 30 % aux États-Unis).
Le secteur bancaire européen est donc en pleine santé : ROE plus élevé, excédent de capital, profils moins risqués. Les récents plans de réforme du secteur sont très encourageants pour l’avenir. Mais malgré ces aspects positifs, l’Europe reste fragmentée et donc peu compétitive par rapport aux banques américaines, où la consolidation a été en grande partie achevée au cours de la dernière décennie.
Pour l’unification
L’Europe doit accélérer l’unification bancaire afin d’améliorer sa compétitivité par rapport aux géants américains et asiatiques. Cependant, nous devons nous débarrasser des anciens démons protectionnistes qui freinent la consolidation. Pensons aux restrictions sur le rapport prêts/dépôts, souvent imposées par les gouvernements pour forcer le financement interne de l’économie réelle.
L’Europe tirerait au contraire parti de l’accélération de réformes telles que la titrisation, qui permettent aux banques de mieux gérer les risques tout en continuant à financer l’économie. La titrisation est un instrument largement utilisé depuis longtemps aux États-Unis.



